Bulletin trimestriel de FIDANZA EXPERTISE CONSEIL
Numéro 3
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EDITORIAL
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Pour de nombreux groupes, cette période correspond ou a correspondu à la finalisation des comptes annuels avec notamment l’établissement de l’annexe consolidée. Il nous a semblé intéressant de nous interroger, dans ce numéro, sur les arbitrages à faire par le directeur financier dans la présentation de cette information financière.
Ce numéro présente également une solution novatrice pour connecter comptabilité et fiscalité dans un système intégré. Cette solution trouve notamment une application dans les travaux de consolidation, dans lesquels la fiscalité a un impact fort.
Nous espérons que ces différentes thématiques aideront les directeurs financiers dans l’une de leurs nombreuses missions : celle de garantir la production d’une bonne information financière.
DOSSIER :
Information financière et notes annexes : quels arbitrages ?
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L’information financière a un rôle clé pour les partenaires des entreprises, qu’ils aient un rôle financier, commercial ou autre. Les comptes annuels avec l’annexe constituent la pierre angulaire de cette information. Au cours des dernières années, l’annexe des comptes consolidés s’est beaucoup enrichie d’informations rendues obligatoires par la loi ou fortement recommandées par des normes internationales. Dans ce dossier consacré à l’annexe consolidée dans la réglementation française, nous exposerons un rappel des informations demandées sous les angles des risques et de la comparabilité, puis, le point de vue librement exposé d’un enseignant-chercheur, enfin, l’opinion d’un praticien. |
DOSSIER / Le conseil de l’expert
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« L’annexe aux comptes consolidés dans le référentiel français
(CRC 99.02) »
Par Patrick EDREI, expert-comptable, référent comptes consolidés.
Les objectifs donnés aux informations financières sont fréquemment l’allocation équitable des ressources financières, le maintien du jeu concurrentiel et la communication d’une bonne information sur les caractéristiques des produits financiers et en particulier sur le résultat récurrent fourni par l’entreprise.
Si l’on s’interroge sur ses caractéristiques qualitatives, une information de qualité peut être définie comme exacte, précise et sincère. Or, la seule communication des chiffres des états financiers ne suffit pas à éclairer le lecteur sur la situation financière et la performance d’un groupe. L’annexe est indispensable pour compléter cette information. Nous aborderons successivement les caractéristiques générales de l’annexe, avant d’aborder l’information fournie selon deux axes particulièrement sensibles pour le lecteur, investisseur ou partenaire : les risques et la comparabilité.
1. CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DE L’ANNEXE 99.02
Le paragraphe 420 du règlement CRC 99.02 stipule :
L’annexe doit comporter toute information de caractère significatif permettant aux utilisateurs des comptes consolidés de porter une appréciation sur le patrimoine, la situation financière et le résultat de l’ensemble des entreprises comprises dans la consolidation. L’information porte au minimum sur l’exercice écoulé et sur le précédent.
La notion d’importance significative est clairement explicitée par les textes ; il ne s’agit pas de fournir toute l’information sur tout, mais de sélectionner l’information significative. Pour cerner la notion d’information significative, la définition à contrario d’anomalie significative donnée par la CNCC permet de mieux appréhender cette notion :
Anomalie significative : information comptable ou financière inexacte, insuffisante ou omise, en raison d’erreurs ou de fraude, d’une importance telle que, seule ou cumulée avec d’autres, elle peut influencer le jugement de l’utilisateur d’une information comptable ou financière.
Un des objectifs principaux de l’annexe est d’indiquer les principes comptables qui ont été utilisés dans l’établissement des comptes consolidés. En pratique, il peut être difficile pour le lecteur de s’y retrouver, compte tenu de la mouvance constante des règles comptables au cours de la dernière décennie. Les règles du règlement français CRC 99.02 avaient été inspirées par les normes internationales (IAS), en particulier pour des méthodes comptables annoncées comme préférentielles, telles que la comptabilisation des engagements de retraite ou des contrats de location-financement. Mais ces règles IAS, nommées désormais IFRS, ont évolué. Par conséquent, un groupe établissant des comptes selon le référentiel CRC 99.02 peut-il encore faire référence à ces normes pour traiter des sujets pour lesquels les règles françaises sont imprécises ? La réponse est positive dès lors que les normes internationales appliquées par un groupe ne sont pas contraires au référentiel français et que l’information sur le référentiel adopté est clairement explicitée dans l’annexe.
Ainsi, dans son paragraphe 421-a, le règlement CRC 99.02 demande que référence soit faite au référentiel adopté : « référentiel aux règles françaises et le cas échéant aux règles internationales ou à des règles internationalement connues ». En pratique, les règles internationales sont les normes IFRS et les normes internationalement connues, les règles US Gaap.
L’AMF sous son ancienne dénomination COB a aussi précisé qu’une entreprise peut faire référence à un ensemble de règles étrangères sans toutefois les appliquer entièrement, à condition de présenter une information claire en annexe.
À ce sujet le paragraphe 424 du règlement CRC 99.02 indique dans son point b :
Quand les entreprises appliquent les méthodes préférentielles pour comptabiliser les coûts de développement, les engagements de retraite et avantages similaires, les contrats de location-financement, les contrats à long terme, elles doivent indiquer expressément dans l’annexe la référence et les modalités d’application de la méthode de comptabilisation utilisée. Il en est de même pour la détermination des indices de perte de valeur et les modalités de calcul utilisées pour les tests de dépréciation prévus au 1er alinéa du §21130.
2. INFORMATIONS SUR LES RISQUES
Certains postes du bilan sont particulièrement sources de risques : les actifs incorporels et les écarts d’acquisition, les provisions, les dettes financières et les instruments financiers. Par ailleurs, une information globale sur le bilan et le compte de résultat consolidés est apparue insuffisante pour informer correctement le lecteur sur les risques intrinsèques du groupe ; l’information sectorielle pallie cette insuffisance.
Enfin, ce qui n’est pas comptabilisé, et donc absent des états financiers, peut être source de risques bien plus importants que ce qui est « dans les tuyaux comptables », d’où l’importance accordée aux engagements hors bilan.
Le législateur français a donc naturellement prévu la communication d’informations détaillées sur l’ensemble de ces postes.
2.1. Les écarts d’acquisition
En normes françaises, les écarts d’acquisition font l’objet d’un plan d’amortissement mais le paragraphe 21130 du règlement CRC 99.02 prévoit que «des changements significatifs défavorables intervenus conduisent à un amortissement exceptionnel ou à la modification du plan d’amortissement, toute dépréciation étant exclue». Le référentiel français ne précise pas les modalités de détermination de la valeur d’inventaire et les groupes, peuvent selon les recommandations de l’AMF, se référer aux normes IFRS (IAS 36 en particulier). Le groupe devra dès lors indiquer ces modalités dans son annexe avec une grande vigilance. Ainsi, dans une décision du 20 mai 2010, l’AMF a souligné comme délibérément trompeur le fait d’indiquer en annexe des comptes que des tests de dépréciation des écarts d’acquisition avaient été réalisés alors que ce n’était pas le cas.
2.2. Les provisions
Concernant les provisions, le règlement CRC 2000-06 du 7 décembre 2000 et le PCG rendent obligatoire une information détaillée sur les provisions individuellement significatives (sans que soit défini le caractère significatif) quant à leur nature, les hypothèses et incertitudes, et les indemnités éventuelles à recevoir en contrepartie. Les mêmes informations sont à communiquer pour les passifs éventuels.
Un arbitrage peut devoir être exercé dans le cas où la divulgation d’informations créerait un préjudice sérieux à l’entreprise. Cet arbitrage trouve un cas d’application en cas de litige, notamment fiscal où il est toléré qu’aucun montant ne soit communiqué dans l’annexe, tolérance exprimée aussi bien par l’AMF que la CNCC.
2.3. Les dettes financières et les instruments financiers
Pour les dettes financières, le paragraphe 424 du règlement CRC 99.02 demande que soient fournis :
- ventilation par nature, avec notamment l’indication des montants correspondant à des contrats de crédit-bail retraités ;
- ventilation par principales devises, par échéance (moins d’un an, plus d’un an et plus de cinq ans), par nature de taux (fixe, variable), en prenant en compte les instruments de couverture y afférent ;
- état des sûretés réelles accordées en garantie.
La notion d’échéance de l’endettement permet d’apprécier la solvabilité d’un groupe au regard de sa trésorerie et de ses cash-flows d’exploitation. Une information erronée, qui plus est si elle est reprise dans le rapport de gestion, peut induire le lecteur en erreur sur la capacité réelle du groupe à faire face à ses échéances. Le groupe devra donc préparer, en amont des travaux d’arrêté, les procédures de collecte de cette information qui peut se révéler très lourde à produire.
Pour les instruments financiers, le même paraphage demande les indications suivantes :
- information sur la valeur de marché des instruments financiers comparée à la valeur inscrite dans les comptes ;
- informations sur les risques de taux, risque de change et risque de contrepartie sur l’ensemble des instruments financiers ;
- informations sur les couvertures de transactions futures ;
les indications sur le volume et la nature des instruments.
2.4. L’information sectorielle
Le paragraphe 425 du règlement 99.02 prévoit que l’annexe comprenne les informations sectorielles suivantes :
- comptes synthétiques des entreprises consolidées dont les comptes sont structurés de manière très différente de l’ensemble des entreprises du périmètre ;
- ventilation du chiffre d’affaires et des immobilisations ou des actifs employés par zone géographique ou monétaire et par secteur d’activité ;
- ventilation du résultat d’exploitation par zone géographique et/ou par secteur d’activité selon le mode d’organisation choisi par le groupe.
Pour les besoins de cette information sectorielle, un secteur d’activité ou une zone géographique est défini comme un ensemble homogène de produits, services, métiers ou pays qui est individualisé au sein de l’entreprise, de ses filiales ou de ses divisions opérationnelles. La segmentation adoptée pour l’analyse sectorielle devrait être issue de celle qui prévaut en matière d’organisation interne de l’entreprise. Les secteurs d’activités ou les zones géographiques représentant moins de 10 % du total consolidé peuvent être regroupés.
La règlementation française est assez vague sur certains points tels que la définition de l’information qui prévaut en matière d’organisation interne. Le groupe publiant ses comptes selon le référentiel CRC 99.02 pourra utilement se référer à l’ancienne norme IAS 14 qui a inspiré la règlementation française (dans la règlementation internationale, la norme IFRS 8 a remplacé la norme IAS 14). Cette norme IAS 14 faisait clairement référence au reporting interne destiné à la direction générale. De même, pour répondre à la question de savoir si le dépassement du seuil de 10% pour l’un des indicateurs impose de communiquer sur les trois indicateurs, le producteur d’informations trouvera une réponse positive dans la norme IAS 14. En pratique, le reporting interne d’un groupe peut être établi selon un corps de règles différent de celui utilisé pour les comptes consolidés, sans par exemple certains retraitements comptables comme celui des locations financements. L’information sectorielle ainsi disponible est-elle communicable en l’état dans l’annexe ? La réponse est négative compte tenu du principe général posé par l’article R123-199 du code de commerce qui indique :
Les éléments chiffrés de l’annexe sont, sauf exception dûment justifiée, déterminés selon les mêmes principes et les mêmes méthodes que pour l’établissement du bilan et du compte de résultat. Ils concernent l’ensemble des activités de l’entreprise quel que soit le lieu de leur exercice. Ils sont vérifiables par rapprochement avec des documents justificatifs.
Enfin concernant le traitement des flux intra-groupe, il pourra aussi être fait référence à l’ancienne norme IAS 14 qui indique que l’information présentée est hors élimination des flux inter-secteurs mais avec élimination des flux intra-secteur.
2.5. Les engagements hors bilan
L’article 233-14 10° du code de commerce demande dans l’annexe :
Le montant global des engagements financiers qui ne figurent pas au bilan consolidé, pris envers les tiers par l’ensemble des entreprises consolidées par intégration, le montant des engagements en matière de pensions et indemnités assimilées d’une part, le montant des engagements financiers à l’égard des entreprises liées au sens du 9° de l’article R. 123-196 mais non consolidées par intégration d’autre part, sont mentionnés distinctement.
Rappelons que selon l’article R123-196, une entreprise est liée si elle est susceptible d’être consolidée par intégration globale ; cependant l’article 425 du règlement CRC 99.02 précise que sont demandées les informations relatives avec les entreprises liées non consolidées par intégration globale ou proportionnelle. Par contre, l’information demandée ne concerne pas les engagements pris avec les sociétés mises en équivalence. Le même article 425 demande « les informations relatives aux effets escomptés non échus et autre engagements donnés et reçus ainsi que les informations relatives aux autres risques et engagements ». Cette conception est large et vise à couvrir tout engagement du groupe qui ne serait pas présent dans les états financiers. Concernant les contrats de fiducie, compte tenu de l’évolution de la législation, le règlement 99.02 comprend désormais explicitement les informations à fournir dès lors qu’une entité du groupe est une entité constituante.
Le paragraphe 214 du règlement CRC 99.02 prévoit également que « l’annexe mentionne les informations significatives concernant le coût ou le prix des acquisitions et des cessions effectuées entre la date de clôture et la date d’arrêté des comptes ».
3. INFORMATIONS PERMETTANT LA COMPARABILITÉ ET L’APPRÉHENSION D’UN RÉSULTAT RÉCURRENT
Le jugement de l’utilisateur de données financières se base non seulement sur la comparaison des données historiques, mais aussi sur la compréhension du passage entre ces données. Un de ses premiers objectifs sera d’évaluer le résultat récurrent produit par le « business » mais il cherchera aussi, à travers la compréhension des flux entre les bilans communiqués, à percevoir la vie du groupe avec ses opérations d’investissement, ses transactions financières et opérationnelles.
En pratique, cet exercice est difficile compte tenu de la multiplicité des flux et en cas d’opérations d’achats ou ventes de sociétés par un groupe, d’où des principes d’analyse des flux et de comparabilité posées par le législateur.
3.1. L’information sur les flux
Le règlement 99.02 n’indique pas le niveau de détail à fournir mais selon la doctrine, il convient au moins de faire apparaître pour les postes du haut de bilan (hors capitaux propres et intérêts minoritaires qui sont des postes particuliers) :
- Les acquisitions et augmentations de dettes ou provisions ;
- Les cessions et les diminutions de dettes ou provisions (en distinguant pour celles-ci, la part utilisée et la part non utilisée) ;
- L’impact des variations de taux de change ;
- L’impact des variations de périmètre.
Concernant les reprises de provisions, la communication du montant éventuel des reprises non utilisées, permet de définir l’impact de ce boni sur le résultat de l’exercice, et par déduction, de calculer un résultat « récurrent ».
À propos de la notion de résultat récurrent et à contrario du résultat non récurrent, la notion de résultat exceptionnel devrait être bientôt abandonnée en France avec l’adoption de la directive comptable européenne unique venant remplacer la 4e et 7e directive et qui doit être transposée en droit national en 2015 pour une mise en application en 2016.
En attendant, le groupe doit être explicite dans son annexe sur la notion de résultat courant adoptée (en ce sens, paragraphe 421 du règlement CRC). Il est probable que la revue de la présentation du compte de résultat français pour 2016, soit ensuite suivie de précisions données par le législateur, sur la classification des flux entre les différentes lignes du résultat courant, à l’image de ce qui existe déjà dans le référentiel international avec la notion d’OCI (Other Comprehensive Income).
Concernant les capitaux propres, part du groupe, la présentation d’un tableau d’analyse de la variation est obligatoire en vertu du paragraphe 424 du règlement 99.02. Rappelons par ailleurs, que sur un plan purement technique, la réalisation de ce tableau est indispensable dans le processus de consolidation. Il permet de vérifier la bonne comptabilisation des opérations, en particulier de variations de périmètre.
Pour le suivi de toutes ces opérations, il est essentiel d’avoir un outil de consolidation, aussi bien pour la collecte que pour les opérations centrales, qui analyse les transactions en fonction de la catégorie de flux d’appartenance. Le fonctionnement par flux dès l’origine de la collecte ou de l’opération de consolidation facilitera grandement l’analyse.
3.2. Les principes de comparabilité en cas de variation de périmètre
D’après l’article R233-14 du code de commerce :
L’annexe doit notamment comporter les informations sur « les circonstances qui empêchent de comparer, d’un exercice à l’autre, certains postes du bilan et du compte de résultat consolidés ainsi que, le cas échéant, les moyens qui permettent d’en assurer la comparaison, en précisant les effets des variations du périmètre de consolidation.
L’AMF dans un bulletin COB de 2002 a présenté l’utilité des données pro-forma : « Les présentations comptables pro forma ont pour objet de rendre comparable dans le temps, des séries de données comptables dont la comparaison directe est rendue difficile, voire impossible en raison d’évènements intervenus ou devant intervenir ».
Le paragraphe 423 du règlement CRC 99.02 est dédié aux informations à prévoir dans l’annexe consolidée pour assurer la comparabilité des comptes soit : « La justification des changements comptables et de leur incidence sur le résultat consolidé et les capitaux propres ». En cas de variation de périmètre, « des informations pro forma relatives au chiffre d’affaires et au résultat net sont présentées pour l’exercice en cours, comme si le changement de périmètre était intervenu à l’ouverture de l’exercice. Ces informations tiendront compte notamment des amortissements des écarts d’acquisition et des frais financiers entrainés par l’acquisition ».
Enfin le règlement 99-02 dans son paragraphe 214 (sous-section de la section consacrée à l’entrée d’une entreprise dans le périmètre de consolidation par intégration globale) précise que « l’annexe mentionne également l’incidence des changements significatifs portant sur tout poste du bilan, le résultat net ainsi que du tableau de flux de trésorerie consolidés affecté par cette acquisition ».
Quand l’impact est-il significatif ? L’appréciation peut être difficile mais l’article 222-2 du règlement général de l’AMF apporte une précision utile pour les groupes cotés, dont les groupes non cotés pourront s’inspirer : « En cas de changement de périmètre ayant un impact sur les comptes supérieur à 25 %, l’émetteur présente une information pro forma concernant au moins l’exercice en cours, selon des modalités fixées par une instruction de l’AMF ».
En conclusion :
L’établissement de l’annexe est un exercice d’appréciation dans lequel le directeur financier doit s’interroger sur l’utilité et la pertinence de l’information, l’objectif étant de donner au lecteur toute l’information utile pour une appréciation éclairée de la situation financière et de la performance du groupe. L’anticipation des travaux par une vigie assurée tout au long de l’exercice, permet de collecter et traiter les informations à faire apparaitre dans l’annexe consolidée pour répondre aux objectifs de transparence et comparabilité des états financiers pour les tiers. L’information ainsi collectée permet également de mieux expliquer les comptes consolidés à la direction générale et de positionner la direction financière, au sein du groupe, comme garant d’une bonne information sur les comptes.
DOSSIER / L’analyse du chercheur
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« Privilégier des indicateurs pertinents pour démocratiser l’information financière. »
Frédéric Compin, docteur en Droit (EHESS), en sciences de gestion (CNAM) et en sociologie (Université d’Evry-val d’Essonne).
Interviewé par l’équipe de Fidanza, Frédéric Compin a librement exposé son analyse et ses critiques à propos du cadre actuel de production de l’information financière.
Fidanza : On dit souvent que l’information financière permet une allocation équitable des ressources financières et le maintien du jeu concurrentiel. Dans quelles mesures, l’information annexe permet-elle de donner de véritables indications par rapport à ces attentes ?
F. Compin : Je souhaiterais revenir tout d’abord sur l’allocation équitable des ressources. Tout dépend essentiellement du cadre normatif. Les protagonistes à l’échange (émetteurs d’information financière et les receveurs) se fédèrent autour de cette information financière. Lorsque cette information financière est « partisane » c’est-à-dire construite au service d’entités privées (groupes de pression), elle ne peut pas fournir d’information fiable, puisqu’elle répond à des critères idéologiques. C’est le premier axe de mes recherches : dénoncer une information financière (notamment dans le cadre des normes IFRS) construite pour servir les intérêts des actionnaires et non pour conférer à l’information financière la qualité de bien public. Si la base de départ est faussée, l’information annexe sera totalement dépendante de choix globaux idéologiques.
Ensuite, l’information annexe va renseigner les parties prenantes sur tout ce que l’on ne trouve pas dans les documents de base, encore faut-il savoir si l’on n’a pas d’informations cachées et de non-dits. Ce sont les axes sur lesquels je travaille en qualité de chercheur. Je suis toujours très sceptique sur les annexes pléthoriques qui finalement ne renseignent pas forcement de façon optimale, sachant que les grands axes de départ sont faussés.
Je crois que la base de départ avant de travailler sur le contenu de l’information, c’est de se fédérer autour de maximes qualitatives, savoir si l’information financière est là pour refléter les valeurs de marché ou si elle est élaborée pour refléter à la fois une valeur de marché, une valeur économique et une valeur sociale.
F : Selon vous, la fréquence actuelle de la production des informations répond-elle ou non à la nécessité de confiance, de transparence de l’information financière ?
F. Compin : En fin de compte, on s’est fédéré sur la directive européenne transparence qui offre un cadre rigide. La directive transparence ne définit pas la notion de transparence, elle définit une information règlementée extrêmement abondante et détaillée. Est-ce que pour autant on atteint l’objectif ? Je n’en suis absolument pas sûr. Je crois que l’on confond la régulation de l’information financière, qui vise à donner des grands principes directeurs afin d’offrir une information la plus fiable possible, avec une réglementation hyper tatillonne qui finalement fige dans le marbre des procédures, contraint les praticiens et laisse une grande part d’autonomie voir d’autorégulation. Je pense que cela entraîne un effet contreproductif. Il faudrait lever les contraintes abusives pour cibler l’essentiel.
La fréquence des informations est relativement moins importante que la question de savoir si on communique en temps réel. Il y a un adage comptable qui vise à dire : la valeur d’un renseignement comptable décroit comme le carré du temps à le fournir. Lorsqu’on a une information pertinente à communiquer, on peut mettre en place des profits warning ou alertes en temps réel, c’est-à-dire qu’on informe immédiatement les parties prenantes. La fréquence ne garantit absolument rien. Par contre la somme de contraintes techniques agit comme un épais nuage de fumée pour ne pas se remettre en cause sur les objectifs à atteindre.
F : Comment percevez-vous l’utilisation des informations financières et notamment des informations annexes par les grands investisseurs, les investisseurs institutionnels et les particuliers ?
F. Compin : Je les perçois un peu comme des notices médicales, c’est-à-dire que les initiés la comprennent, les investisseurs institutionnels sont capables de l’organiser en fonction de leurs propres besoins et les épargnants de base sont souvent dépassés par cette information qu’ils ne perçoivent pas forcément de façon éclairante. Quand j’interroge, comme chercheur, des producteurs d’informations, ils me disent « est-ce que vous cherchez à comprendre la composition chimique des médicaments ? Pourquoi cherchez-vous à avoir une information que vous puissiez parfaitement comprendre si c’est l’art des spécialistes ? ». Et là, c’est une erreur fondamentale.
Il faut que l’information financière soit démocratisée, accessible à tous avec des indicateurs clés efficaces, peut-être peu nombreux pour que les épargnants de base ne soient pas trompés sur la qualité.
F : Quelles informations-clés préconisez-vous pour les épargnants grand public ?
F. Compin : Je pense que les sociétés cotées et les PME doivent communiquer sur une batterie d’indicateurs succincts avec une permanence de méthodes. Si on veut être efficace dans l’acte communicationnel, il ne faut pas multiplier les indicateurs. On a besoin d’indicateurs de performance de base : Chiffre d’affaire, Résultat net comptable, bénéfice par action, ROE, EBE, VA, de quelques indicateurs-clés. Mais nul besoin d’indicateurs dérivés, complexes, quasi inaccessibles, voire inaudibles. Je suis pour une communication de base qui soit la plus pertinente possible, la plus fiable possible associée à des indicateurs compréhensibles par tous, sans pour autant qu’ils soient « manipulés ».
F : À votre sens, la gouvernance des entreprises a-t-elle permis une amélioration de la qualité d’information ?
F. Compin : Ce qui est important, c’est de savoir s’il y a un pouvoir et un contrepouvoir dans le cadre de la gouvernance. Tout dépend de la structure juridique et des sociétés qui sont en place. Si vous avez des gouvernances de type patriarcal qui n’évoluent pas malgré la loi sur les nouvelles régulations économiques (loi NRE), vous ne ferez rien évoluer. Si, par contre, vous avez un véritable contrepouvoir dans les conseils de surveillance, avec des comités d’audit qui sont écoutés, des comités de rémunération qui vont au cœur du problème, à ce moment-là, la base normative est efficace. Je pense que c’est l’un des grands problèmes institutionnels en matière d’information financière, séparer ceux qui ont le pouvoir de ceux qui peuvent exercer des contrepouvoirs.
F : Avez-vous analysé la pertinence des informations communiquées sur certains sujets sensibles tels que les changements de périmètres et les pro-forma, les informations sectorielles, l’application du principe de substance-over-form (prééminence de la réalité économique sur la forme), etc. ?
F. Compin : Je n’ai pas de qualité de praticien, je vois cela de façon plus détachée. Le point de vue du chercheur peut même parfois paraître déconnecté de la réalité puisque nos préoccupations ne sont pas forcément les mêmes. J’ai analysé le principe de substance sur la forme et particulièrement bien dans le cas des normes comptables internationales et je suis un opposant déterminé à ce que le droit devienne évanescent au profit d’une logique économique qui serait en fait une logique de marché financier.
J’ai également analysé l’information pro forma. La question essentielle porte sur les changements de périmètres et le respect du principe de permanence des méthodes. Est-ce que l’on est en mesure d’offrir deux jeux de comptes semblables qui permettent à des épargnants de s’y retrouver ? Savoir si une comptabilité de pro-forma renseigne suffisamment les épargnants sur des choix d’option comptable ou sur des évènements exceptionnels. C’est, pour moi, le plus important. C’est sur ce point-là que je me positionne.
F : Est-ce que vous avez analysé l’impact de l’inflation règlementaire en termes d’information financière sur la volatilité du cours des titres ?
F. Compin : J’ai analysé l’information réglementée sur le plan juridique. J’en suis arrivé à la conclusion qu’il y a un paradoxe : l’information hyper réglementée répond davantage aux exigences des courants néoclassiques qui considèrent que les marchés sont efficients. À partir du moment où vous rendez le cadre réglementaire inefficace, vous laissez les marchés s’autoréguler et produire l’information qu’ils veulent. Donc je suis très critique sur l’hyper réglementation qui finalement ne fait qu’entraver l’action d’une production efficace et pertinente. Il convient de se fédérer autour de deux principes essentiels, l’égalité de traitement entre investisseurs et l’équité d’accès à l’information.
F : Pour conclure, voyez-vous d’autres aspects dans les risques, les arbitrages, dans la production de l’information financière, l’information annexe à évoquer ?
F. Compin : Oui, on a deux risques majeurs. Le premier concerne les effets de mimétisme quand une information n’est pas comprise, avec des mouvements amplificateurs. C’est pratiquement incontrôlable, c’est pour ça qu’il faut se fédérer sur des indicateurs-clés de base que les communautés vont accepter sans biais. Le deuxième effet très pervers, ce sont les rumeurs sur les marchés financiers qui sont totalement déstabilisantes et qui nécessitent de conférer au CAC ou au comptable, un véritable statut de lanceur d’alerte. Si l’on veut pouvoir immédiatement contrer ces rumeurs sur les marchés financiers, faut-il encore que l’on ait totalement confiance dans le certificateur des comptes, et qu’on puisse se fédérer sur le concept d’image fidèle. On a vu des sociétés traînées dans la boue par des concurrents qui lançaient de fausses informations, obligées de refaire certifier leurs comptes une deuxième fois alors qu’ils étaient sains dès le départ. Il faut conférer aux lanceurs d’alerte un véritable statut juridique afin d’éviter toute sorte de polémique stérile.
DOSSIER / L’avis du DAF
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« Les notes annexes, simplement du bon sens. »
Jean-François Delmas est membre fondateur, vice-président et secrétaire général de l’association des Managers et du Management de transition (A2MT) ; il est également associé chez 2 AC Finance, (anticipation, accompagnement, conduite du changement – DAF).
Je trouve ce thème très intéressant car il concerne tous les acteurs économiques qui contribuent à la valeur ajoutée de l’entreprise, dont bien évidemment les tiers partenaires, contrôleurs légaux et fiscaux ainsi que les analystes en général.
Au cours de mon parcours professionnel, j’ai été amené à vérifier les informations de ces états puisque j’ai œuvré en qualité de directeur de mission au sein d’un cabinet d’audit, puis, en qualité de Directeur Administratif et Financier au sein d’environnements internationaux d’ETI et de PME. J’ai sur cette question une expérience en tant que salarié, en qualité d’actionnaire, mais aussi comme représentant de colistiers investisseurs familiaux. J’ai également été confronté à la communication des informations auprès de l’expert-comptable du comité d’entreprise, expérience riche des relations avec les IRP.
« Une approche de bon sens, une attitude pédagogique »
Mon propos au sein de cette tribune n’est pas d’évoquer les aspects techniques et la conformité avec les prescriptions légales mais bien une approche de bon sens.
Sur le principe, personne ne peut nier l’intérêt des notes annexes lorsque celles-ci apportent une information complémentaire pertinente permettant de mieux apprécier les éléments chiffrés des états financiers, mais il me semble essentiel que ces notes privilégient trois éléments :
- une approche analytique et prospective à chaque fois que nécessaire ;
- une réelle appréciation des engagements hors bilan et leur signification ;
- des notes complémentaires où la prose l’emporte sur le chiffre.
Les états de synthèse représentent une photographie, il serait inconcevable de présenter ceux-ci sans une approche analytique et prospective (d’ailleurs, la réglementation le souligne).
Concernant les engagements hors bilan, cela me semble également être du bon sens. Il y a ce qui est déjà contracté et qui est déjà connu à travers la communication externe de l’entreprise, et les projets en cours qui font l’objet de négociations abouties ou en cours et non signées. L’essentiel est de ne pas rendre anxiogène la présentation ; on prendra donc les précautions dans l’intérêt de l’entreprise.
L’être humain est fait de telle façon que le langage le plus usuel afin d’échanger reste au demeurant la parole ou l’écrit. Venant en complément d’états financiers très « chiffrés », l’ensemble de ces documents étant destiné au public le plus large, il convient donc d’avoir une attitude pédagogique.
La règlementation fait le distinguo entre sociétés faisant un appel public à l’épargne et les autres, soulignant une échelle. Cela me semble pertinent, à condition que l’approche des notes annexes soit pédagogique ; par contre, pour les sociétés non cotées, la réglementation ne fait pas de différence entre sociétés « fermées » et sociétés « ouvertes ». Il existe aussi des critères pied de bilan (chiffre d’affaire, etc) parce qu’il faut bien des critères. On pourra toujours critiquer leur pertinence mais ceux en place me semblent permettre la création d’une échelle de valeurs admissible et comparable entre les secteurs d’activité.
« Non la quantité mais bien la qualité des informations des annexes »
Aujourd’hui les nouvelles formes d’investissement, la « love money », bref la venue de ces nouveaux investisseurs nécessite à mon sens d’avoir une approche différente sur le plan qualitatif entre sociétés « fermées » et sociétés « ouvertes ». Ce n’est pas la quantité mais bien la qualité des informations des annexes qui font de celles-ci un support d’informations apprécié.
Ce qui conditionne également la qualité des informations, c’est bien l’outil qui permet de la formaliser. Le DAF, toujours soucieux de la productivité de ses services, aura une tendance bien naturelle à essayer d’automatiser à maxima la production de l’ensemble des documents à travers un ou des outils. Je pense que l’industrialisation de cette production est ce qu’il y a de plus nuisible à la qualité de l’information, privilégiant les tableaux et chiffres au détriment de la note. Souvenez-vous de ces notes annexes qui ne font que reprendre un détail chiffré d’un poste sans plus d’explication. Le DAF doit aussi être business partner, surtout concernant les engagements hors bilan. Le reporting doit permettre d’apprécier ces éléments à chaque closing mensuel, a fortiori au moment du closing annuel.
Autre difficulté, ces notes annexes et les états financiers sont les mêmes pour tous les destinataires. C’est cette standardisation qui risque de freiner la diffusion de certaines informations, non par volonté de cacher des éléments, mais surtout afin de préserver tous risques de réaction anxiogène de la part du lecteur. La perception de l’information est différente en fonction du public. Malheureusement, si la règle de prudence est mal gérée, on préfèrera ne pas diffuser plutôt que de faire prendre un risque d’incompréhension.
Autre sujet soucieux : la notion de confidentialité sur des sujets stratégiques qui présenteraient un risque certain en cas de diffusion. Je pense que « nécessité fait loi », le DAF s’attachera à respecter autant que faire se peut la réglementation mais, dans le respect des règles sécuritaires de l’entreprise.
La représentation professionnelle et syndicale de branche peut apporter un soutien à ses membres. Par exemple, certaines représentations patronales de branche ont créé des groupes de travail à ce sujet et les conclusions de ces groupes ont permis de « formater » un guide très utile pour le DAF.
Enfin, une règle fondamentale afin d’éviter tous les risques : la Direction Générale doit s’impliquer au sujet de la validation des documents et surtout des annexes. Le DAF produit, il est force de propositions, il bénéficie d’une délégation forte à ce sujet, mais la responsabilité des éléments produits est du ressort d’une direction générale.
« La présentation doit être bien préparée »
Cela milite pour que la présentation de ces documents se fasse à maxima en « face to face » avec les interlocuteurs majeurs de l’entreprise. Rien ne remplacera une explication ou un commentaire auprès de son interlocuteur, car il y a forcément des éléments qui peuvent être formalisés et d’autres qui nécessitent une relation privilégiée. Ceci est valable également pour les relations sociales ; la présentation aux IRP, à fortiori quand il n’y a pas d’expert auprès du CE, doit être bien préparée. Quand l’expert est présent, ses connaissances professionnelles lui permettent d’apprécier les subtilités (et on aura pris la précaution d’un premier rendez-vous avec l’expert avant la plénière).
Enfin, les états financiers et les notes annexes ne sont pas les seuls moyens d’information pour les tiers partenaires ou non. Il existe des relais intermédiaires forts, sans que la liste soit exhaustive :
- Les analystes
- Les partenaires sourceurs de l’entreprise (fournisseurs,…)
- Les sociétés d’assurance-crédit (SFAC,…)
- Les sociétés d’assurance
- Les partenaires financiers
En synthèse :
- Le DAF est le garant du respect de la réglementation en vigueur mais il est aussi le gardien de la gestion des risques et une incompréhension par un lecteur influent est un risque.
- C’est la qualité de « business partner » qui permettra au DAF d’apprécier au mieux les risques de communication.
- Le DAF doit être capable d’arbitrer dans l’intérêt de l’entreprise et apporter, sous une autre forme, l’information utile.
- Trop d’information tue l’information. Il convient de privilégier la présentation face à face avec les partenaires et intermédiaires ciblés.
- C’est la direction générale qui valide en final les éléments de communication.
D’AUJOURD’HUI POUR DEMAIN :
Rapprochement comptabilité / fiscalité : la méthode de la connexion intégrée
Laurent Didelot
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En France, fiscalité et comptabilité sont étroitement liées. En application de l’article 38 du CGI, le résultat fiscal est déterminé à partir du résultat comptable. En principe, un produit latent comptabilisé est imposable et une charge non comptabilisée n’est pas déductible. Le résultat comptable est également dépendant des règles fiscales par l’exigence de comptabilisation des provisions réglementées afin de pouvoir bénéficier de leur déductibilité. 1. Rappels de la situation actuelleLe passage du résultat comptable résultant des opérations purement économiques de l’entreprise au résultat fiscal s’effectue donc à l’aide de deux procédures très différentes : La première méthode repose sur le principe de la partie double. Le suivi historique des charges purement fiscales est ainsi assuré par la reprise des soldes « à nouveau ». En revanche, la seconde ne bénéficie pas de cet atout et représente ainsi un risque fiscal et un surcroît de travail non négligeables pour les entreprises. Le système de connexion comptabilité / fiscalité fonctionne mais il assure peu de sécurité, génère, pour les entreprises et l’Etat, des coûts de suivi ou d’erreurs non négligeables et n’est pas adapté pour supporter un accroissement des divergences comptabilité / fiscalité. Il constitue également un frein à l’évolution des règles comptables françaises et conduit souvent le normalisateur à introduire dans ses projets de réforme des écritures ou options incompatibles avec le but recherché afin de maintenir certaines déductions. La liasse fiscale élaborée lors de ce processus reprend les bases comptables des actifs, passifs, charges et produits mais ne fournit pas leurs bases fiscales. La détermination des bases d’impôts différés, indispensables à l’établissement des comptes consolidés, est de ce fait relativement complexe. Malgré ces imperfections, ce système était probablement le meilleur tant que les outils de traitement de l’information étaient peu performants. Avec le développement de ces derniers, il nous semble possible de n’utiliser qu’une seule procédure de suivi des divergences existant entre la comptabilité et la fiscalité, d’améliorer leur traçabilité dans le temps et, ainsi, de sécuriser les entreprises et l’administration fiscale en ayant recours à la méthode de la connexion intégrée. 2. Les principes de la méthode de la connexion intégréeLa méthode consiste à remplacer les déductions et réintégrations dues aux différences entre les bases comptables et les bases fiscales des postes des bilans comptables et fiscaux par leur enregistrement dans les comptes d’une classe ad hoc (par exemple la classe 8 puisque les comptes 81 à 87 sont disponibles). Les comptes des classes 1 à 7 permettraient d’élaborer, comme c’est le cas aujourd’hui, les documents comptables. La combinaison des comptes comptables (classes 1 à 7) et des comptes de la classe ad hoc (classe 8) aboutirait à l’établissement automatisé de véritables documents fiscaux. Cette proposition n’est pas conditionnée à la modification des règles comptables actuellement en vigueur en France. Son adoption ne générerait aucune modification, aucun accroissement des divergences entre les bases comptables et fiscales (aucune déconnexion supplémentaire). 3. ExemplesUne société est créée au capital de 100 000 (apporté en numéraire).
3.1. Enregistrements effectués au cours de l’exerciceEn comptabilité : En fiscalité : Cf signifie complément fiscal
3.2. Enregistrements effectués à l’inventaireEn comptabilité :
3.3. Documents comptables et fiscaux établis de manière automatisée à partir de ces enregistrements
Documents comptables établis uniquement à partir des comptes de classe 1 à 7 : En effet, la société pourra à l’avenir verser 135 000 € d’avantages économiques aux associés sans payer d’IS, soit 126 000 indiqués par le bilan comptable et 9 000 supplémentaires (par exemple des ventes supplémentaires) qui ne seront pas imposés. En effet, si en N+1 la société vend 9 000 € de services elle n’aura pas d’IS à payer car elle déduira les 9 000 de CSS comptabilisés en N. Cet écart peut s’expliquer aussi en disant que la base fiscale des dettes n’est que de 25 000 alors que leur base comptable est de 34 000. La différence de 9 000 correspond à la dette (comptable) de CSS. Cette dette a une valeur fiscale nulle car elle sera déductible ultérieurement. Tous les comptes des classes 1 à 7 et 8 non soldés seront repris à nouveau en N+1. Le compte 819 sera viré en réserves (8106) au cours de l’exercice suivant afin d’être remis à zéro.
3.4. Tableaux de concordance comptabilité / fiscalité établis de manière automatisée1) Analyse des écarts de fin d’exercice entre les valeurs comptables et les valeurs fiscales des éléments actifs et passifs : Ecarts de valeurs des éléments de passif : 2) Analyse des écarts entre le résultat comptable et le résultat fiscal : – Travail préparatoire : analyse du solde du compte 812 Pour ne pas alourdir le tableau, la colonne déficit reporté n’est pas mentionnée. – Tableau de passage du résultat comptable au résultat fiscal 3) Analyse des écarts entre les capitaux propres comptables et les capitaux propres fiscaux (PAERADIS) : 4. Les avantages de cette méthodePour les entreprises :Simplification du suivi des divergences bases comptables et bases fiscales : - Une écriture de classe 8 trace la divergence existant entre la base comptable et la base fiscale d’un actif, d’un passif, d’une charge ou d’un produit. La reprise des « à nouveau », le cas échéant, assure un suivi dans le temps, quasiment infaillible, d’où une plus grande sécurité fiscale. – Le traitement automatisé des documents fiscaux est facilité. - Il est même possible d’imaginer que le logiciel comptable propose automatiquement un schéma d’écriture fiscale (classe 8) pour tout enregistrement comptable susceptible de générer une divergence fiscale. Meilleure interprétation des documents fiscaux - Les bases fiscales des actifs et des passifs sont immédiatement disponibles, ce qui permet, par exemple, d’évaluer immédiatement l’impact fiscal d’une cession. - Le résultat fiscal liste l’ensemble des produits imposables et des charges déductibles d’où une meilleure compréhension de l’écart entre résultat comptable et résultat fiscal. Simplification de la détermination des bases d’impôts différés : La comparaison des capitaux propres comptables et des capitaux propres fiscaux (PAERADIS) fournit instantanément la base des impôts différés. Remarques : • Dans une petite entreprise ayant aujourd’hui environ 3 000 écritures comptables et 4 ou 5 déductions / réintégrations. Le nouveau système génèrera 4 ou 5 écritures de classe 8 soit 0.2% d’écritures supplémentaires. Le temps consacré à ces écritures fiscales sera récupéré par la disparition des déductions et réintégrations à effectuer et la conception des tableaux extracomptables y afférents. • Dans les grandes entreprises, le nombre d’écritures fiscales sera plus important, mais les économies réalisées par la disparition des tableaux extracomptables seront encore plus avantageuses. • Par conséquent, ce nouveau système pourrait avantageusement être appliqué à toutes les entreprises soumises à un régime réel d’imposition (normal ou simplifié), qu’elles soient soumises à l’IS ou non.
Pour l’administration fiscale :- Contrôles fiscaux plus simples, plus faciles à automatiser car toutes les divergences comptabilité / fiscalité sont enregistrées selon un système unique en partie double (soit en classe 8 soit en provisions réglementées). – Documents fiscaux plus clairs (bases fiscales fournies). – Risques d’oublis des entreprises minimisés. – Détermination de statistiques facilitée :
- Moins de risque d’impacter les documents comptables en modifiant les règles de déductibilité ou d’imposition (une nouvelle divergence pourra être comptabilisée en classe 8 et non plus dans les classes 1 à 7 ou en extra comptable par le 2058 A). - Il sera toutefois toujours possible d’exiger fiscalement l’établissement de l’imprimé 2058 A (au moins dans un premier temps). Celui-ci sera établi automatiquement à partir des écritures de classe 8.
Pour le normalisateur comptable :– Aucun impact en cas de maintien des règles comptables actuelles. - L’adoption de cette proposition pourrait toutefois favoriser l’évolution des règles comptables si le normalisateur national (ANC) le souhaitait (avec l’accord de la DGFiP) car la comptabilisation des provisions réglementées pourrait être « basculée » en classe 8. Ceci permettrait d’avoir des documents comptables plus économiques, plus faciles à comprendre par les chefs d’entreprises, les étudiants en gestion d’entreprise. La modification du résultat distribuable pourrait être neutralisée par une interdiction de distribuer les provisions réglementées.
Pour les experts-comptables et les commissaires aux comptes :– Meilleure fiabilité des traitements fiscaux. - Gain de temps par l’automatisation des écritures purement fiscales et de la réduction des tableaux annexes de suivi. – Meilleurs conseils aux clients grâce aux documents fiscaux établis en bases fiscales. 5. Les inconvénients de cette méthode– Changement d’habitudes. – Adaptation des logiciels. – Formation des personnels chargés de l’établissement des documents fiscaux. 6. Diffusion de la méthodeUn groupe de travail de l’Académie (groupe GT43) a été constitué afin de fournir une appréciation sur cette proposition. Le groupe FIDUCIAL a élaboré un logiciel de comptabilité (spécifique aux huissiers de justice) basé sur ce nouveau système (classe fiscale ad hoc) afin d’être à même de pouvoir présenter, à tout moment, une situation selon une comptabilité d’engagement ou selon une comptabilité de trésorerie. De nombreux articles ont été publiés dans la Revue Française de Comptabilité. ConclusionL’application généralisée de cette approche pourrait soit provenir du « terrain » sur la base du volontariat, les éditeurs de logiciel proposant d’intégrer la classe 8 afin d’automatiser l’édition de la liasse fiscale et de fournir des informations, inexistantes aujourd’hui, utiles pour les prises de décisions et de la détermination des impôts différés, soit, de manière obligatoire, par une modification du code général des impôts. Les services fiscaux pourraient modifier les règles de passage du résultat comptable au résultat fiscal en exigeant la comptabilisation en classe 8 des divergences. Ceci pourrait probablement permettre de « gagner » du temps lors des contrôles fiscaux de base et générer ainsi des économies, non négligeables en période de déficit budgétaire ou de renforcer les contrôles sur des points plus complexes. Contact : laurent-didelot@wanadoo.fr |
L’OEIL SUR LA LOI
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REVUE DE PRESSE
(Janvier, Février, Mars 2014)
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ETI et PME françaises espèrent regagner de la compétitivité par rapport à leurs homologues européennes. [Usine nouvelle, 15.01.2014]
Un lien entre la mise en place de normes environnementale et la productivité ? [DAF MAG, 15.01.2014]
Simplification comptable pour les TPE. [Les Echos, 30.01.2014]
Vers un allègement des contrôles fiscaux ? [BFM TV, 05.02.2014]
Le rôle des CAC dans la RSE. [DAF MAG, 13.02.2014]
L’Europe va imposer une transparence extra-financière aux grands entreprises : [DAF MAG, 24.02.2014]
Mode d’emploi des charges financières déductibles : [DAF MAG, 10.03.2014]
Transparence pour les comptes des Comités d’Entreprise : [Miroir Social, 10.03.2014]
Les dirigeants français sont favorables à la RSE… Mais ne franchissent pas souvent le cap de l’intention : [Les Echos, 14.03.2014]
L’audit légal des petites entreprises pourrait devenir facultatif : [Net PME, 17.03.2014]
À VOS AGENDAS !
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Numéro 3 : Avril – Mai – Juin 2014
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